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11 Juillet 2013
L'Histoire du chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut écrite par l'Abbé Prévost, a été jugée scandaleuse à sa parution en 1733. Saisi et condamné à être brûlé, ce roman d'aventures érotiques connut par la suite un très grand succès. Qu'ils trichent ou tuent, trompent ou se prostituent, nos jeunes libertins n'ont qu'une excuse : l'impérieux appel du sexe." Mes yeux s'habituant à la semi-obscurité, j'aperçus les pâles genoux de Manon : ils s'écartaient sous la robe haut troussée. À peine sorti de l'oeuf, je n'avais jamais encore aperçu ni de près, ni de loin ce que, en langage de collège, on appelait une "moniche' ou encore, ce que les servantes de la maison de mon père, en baissant la voix et s'empourprant jusqu'au blanc des yeux à, nommaient leur "nature'. À présent les jambes de Manon s'ouvraient en grand dans l'ombre de la nappe. " Le co-auteur : Auteur " porno " pendant la nuit, et le jour, correcteur au Figaro, Carlo Vivari ne craint pas les chauds-froids. Et même, il les recherche. De là, le manque intolérable ressenti à la lecture des chefs-d'oeuvre de la littérature, qu'il entreprend ici de corriger.
Lors de la dernière Masse critique de Babélio, j'avais coché ce titre, car d'une part, Manon Lescaut est un classique que je voulais lire depuis de nombreuses années et d'autre part, car j'avais entendu parler de ces classiques revisitée à la sauce érotique et j'avais bien envie de découvrir ce nouveau genre. Finalement, je suis plutôt satisfaite de ma lecture même si quelques petits éléments m'ont dérangés lors de celle-ci.
C'est un soir, en rentrant chez lui après son année scolaire au séminaire que le narrateur, le chevalier Des Grieux rencontre Manon, jeune fille de 16 ans. Une passion dévorante s'empare d'eux et la jeune femme, qui est loin d'être aussi innocente qu'elle ne le parait, réussit à le convaincre de s'enfuir tous les deux et de vivre une vie simple à Paris. Le jeune homme accepte et commence ainsi sa longue descente en enfer.
J'ai été relativement surprise par le récit de ce livre, qui, je dois l'avouer m'a tenu en haleine jusqu'à la dernière page. Certes, il ne faut pas s'attendre non plus à un suspense insoutenable, mais l'ensemble de l'histoire est assez palpitante et bien rythmée. Peut-être un peu trop d'ailleurs, car parfois, j'ai éprouvé un peu de lassitude devant tant de rebondissements. Néanmoins, l'histoire est plaisante, bien qu'un peu trop moralisatrice à mon goût (c'était cependant le but recherché par l'auteur donc il faut lire le roman en tout connaissance de cause).
Les personnages, en revanche, m'ont beaucoup moins plu. Celui de Manon, égoïste à l’extrême et choisissant toujours la solution de facilité plutôt que celle du travail, m'a beaucoup beaucoup agacé. Et ce ne fut guère plus engageant avec le narrateur qui subit les faits sans jamais chercher à s'en sortir de la façon la plus honnête possible. Sa mollesse m'a irrité et très honnêtement, ce couple ne restera pas gravé dans ma mémoire. Pour contrebalancer un peu tout ce vice (il faut aussi ajouter le personnage du frère de Manon, escroc à la petite semelle), l'auteur nous offre une floppée de personnages beaucoup plus vertueux (l'ami du narrateur, son père, le capitaine du navire sur lequel le couple embarque, etc). En soi, un schéma assez classique des romans de l'époque (même si celui-ci se targue d'être une confession du chevalier à l'abbé Prevost, qui la conte ensuite dans ses mémoires, j'avoue avoir du mal à croire à la véracité d'un tel récit).
Parlons maintenant de la spécificité de ce roman : ses scènes érotiques. J'étais un peu anxieuse à l'idée de commencer ce livre, appréhendant la manière dont Carlo Vivari avait pu insérer ces scènes dans le récit et me demandant si la différence entre ces deux styles allait se remarquer. Dans l'introduction du texte, il est bien indiqué que ce dernier a tout fait pour que l'on ne voit pas le passage d'un style à un autre et je dois dire, qu'après lecture, je suis assez bluffée par le résultat car effectivement impossible pour moi de différencier les deux styles et de savoir qui de qui a écrit telle ou telle scène ; d'autant que le livre ayant été jugé scandaleux lors de sa sortie au siècle, je me suis interrogée tout le long de ma lecture sur quelles scènes étaient d'origines et lesquelles avaient été ajoutées. En tout cas, il faut saluer le travail de Carlo Vivari, qui a parfaitement rempli son cahier des charges. Au delà de ça, si j'ai trouvé les scènes érotiques particulièrement bien écrites et en accord avec le style un peu suranné de l'Abbé Prévost, je les ai trouvé un peu trop nombreuses et à la fin, j'en avait un peu assez. J'ai bien envie de vous dire, trop de sexe tue le sexe.
Manon Lescaut est un classique à découvrir. L'histoire est prenante, le style très abordable mais les personnages détestables pourront vous rebuter. L'ajout des scènes érotiques permets de dynamiser un peu l'ensemble mais elles finissent par être trop nombreuses et lassantes. Néanmoins, elles sont parfaitement en accord avec le texte d'origine ! A découvrir. Pour ma part, je retenterais bien l’expérience des classiques avec des scènes érotiques !
Manon Lescaut de l'Abbé Prévost & Carlo Vivari
Historique, Erotique - Editions La Musardine - 288 pages
Où l'acheter : Manon Lescaut, avec des scènes érotiques